La romance de la nuit
Nuit, ô nuit de l’imaginaire
Amante d’un châle enveloppée
La colline te sourit
Une seconde t’invite
De l’appel du poignet à serrer la beauté.
Serais-tu une corde de viole
A Troubler l’âme de la pierre ?
Une frénésie dans le vol des palombes ?
Un lit tendu par le fil de la lune ?
Emporte nous ô nuit, toi, toi qui es l’amour !
Ô nuit noire ! Noire au point où le veut la
splendeur
Ne fus toi, la
plaine n’aurait pas l’étendue
Et deux cœurs ne
prendraient bonheur à la rencontre.
Du désir, tu restes l’unique vocation
Toi l’Infini, l’Illimité
Ô lumière égrenée en musc dans la lumière.
Divague et joue dans les hauteurs
Comme le rai d’âge vert,
Comme chante la taille dans la fine silhouette.
Et si une paupière est par l’autre attirée
Emporte nous ô nuit, toi, toi qui es l’amour !
Tombe Ô nuit et demande à nos belles femelles:
Quelles mains écoulèrent, comme roses, le temps?
Un instant, sommes-nous, et l’univers un autre.
Que seront après nous l’amour?
Les rencontres? Les souhaits ?
Les rendez-vous à l’ombre du sureau ?
Ô le là qui n’est pas le là,
Ô mondes au revers des mondes,
Tu es peine du jasmin, haut mal de la lavande.
Et si nous clamons : la nuit est à nous,
Emporte nous ô nuit, toi, toi qui es l’amour !
Traîner tes robes dans le sentier est odorant
Flexible, fragile, attirant.
L’éclat de ta couleur est pur et rutilant.
Sur les monts tu te jettes
Du temps tu te joues
Tu allumes les astres dans l’esprit radieux.
O faveur ! Ne te laisse pas consumer
Et demeure, Rêve de
lendemain,
Passion d’étreindre dans le leurre des dormants.
L’aube est sur le point de nous tous agresser
Emporte nous ô nuit, toi, toi qui es l’amour !
Nous sommes une guitare assoupie en tes mains
Remue-la, l’horizon vers toi nous inclinera
Ou passe et l’univers à toi nous élèvera!
A l’heure où rien ne
soucie
Pas d’écho, ni l’effet d’une ombre,
La nuit est rossignol caché dans le bois,
Ailes qu’on ne voit pas,
Attirance pour les sommets,
Chant carillonnant
depuis les nuages!
Oh ne comble pas autrui
d’ivresse!
Emporte nous ô nuit, nous qui sommes l’amour !
*Ce qui précède est une tentative de traduire le poème de Saïd
Akl « Najwa al-layl » paru dans son recueil Rindala, 1950.