Marie-Thérèse Oliver-Saidi: Le Liban et la Syrie au miroir français (1946-1991), 394pp, L’Harmattan, 2010.
Le livre copieux que vient de publier Marie-Thérèse Oliver-Saidi sur le Liban et la Syrie dans l’imaginaire français, de l’indépendance de ces pays à la dernière décennie du siècle dernier, ne manque pas d’attraits. Son angle d’attaque est séduisant : deux pays voisins appartenant à un même ensemble arabe et riches de toutes les ambiguïtés d’une fraternité trop rapprochée réunis dans un même miroir, celui de l’ancien pays mandataire qui a peu ou prou assimilé son expérience coloniale ou crypto coloniale. Le foisonnement de la période étudiée en changements, défis et guerres est patent. Enfin, la documentation de l’auteure est ample et cherche à couvrir bien des registres de la politique à l’idéologie et du roman à la poésie…
Mais si le projet général est séduisant, nombre de ses fragments sont délicieux. On en voudra, pour preuve, la partie consacrée au Liban des années 1960 à travers une dizaine de romans policiers parus à l’époque. Au-delà ou en deçà des stéréotypes nombreux et du pittoresque tape à l’œil, l’auteure cherche à la suite d’Umberto Eco, le « réseau d’associations élémentaires » et la « dynamique profonde et originelle » qui sous-tendent l’intrigue. Ainsi passe-t-elle en revue la description que donnent ces œuvres des paysages, leur perception de Beyrouth et de ses ruptures urbaines, leur utilisation des « lieux » comme vecteurs de dépaysement et comme théâtre d’épreuves. « Souks, palais, bains, leur présence consacre l’appartenance reconnue du pays à l’Orient. Elle investit aussi bien l’organisation de l’espace que la représentation sociale, le rapport au temps à l’argent ou au corps ». Cette litanie orientale est, par ailleurs, un maillon entre les vestiges antiques et les points modernes (casinos, banques, cabarets…) Les personnages ne sont pas oubliés où s’affirment les communautés et leurs tropismes, les affaires plus ou moins louches, l’élément féminin dans sa dichotomie orientale (la sultane et l’esclave). Le roman policier fait en définitive ressortir, à travers ses clichés et sur fond de lutte Est-Ouest, un Liban complexe et plus d’une œuvre (celles de Jean Bruce en particulier) devient une parodie de voyage en Orient et de quête initiatique.
Malheureusement l’ouvrage recèle de nombreuses erreurs qui portent leur ombre sur une aussi vaste entreprise. Passe encore le fait de confondre systématiquement Jean Grenier (auteur d’Un été au Liban) et Roger Grenier, de renvoyer à un article de Chiha paru dans L’Orient ; mais que dire de «en 1947, le patriarche maronite de Beyrouth, Mgr Hayek » (erreurs sur la fonction et le titulaire) ? ou « des articles de Georges Naccache dans Al-Nahar » ? ou de Georges Schehadé formé à l’Ecole Supérieure des Lettres ??!! (et quelle distorsion pour son œuvre poétique parue en grande partie dans les années 1930 et 1940 et qui n’a jamais prononcé le mot Liban de la voir ravalée à un miroir de ce pays durant les années 1960 ?)
Mais là où le « miroir français »se brise, c’est quand, sans justification sérieuse, le témoignage des autochtones, écrivant en français ou même en arabe, lui est annexé et que les romans et recueils des Syriens et surtout des Libanais prennent dans le livre une place prépondérante.
L’ouvrage compte certes des faiblesses, il n’en demeure pas moins une contribution importante à l’histoire du rapport des 3 peuples et se lit avec un plaisir certain.
Mais si le projet général est séduisant, nombre de ses fragments sont délicieux. On en voudra, pour preuve, la partie consacrée au Liban des années 1960 à travers une dizaine de romans policiers parus à l’époque. Au-delà ou en deçà des stéréotypes nombreux et du pittoresque tape à l’œil, l’auteure cherche à la suite d’Umberto Eco, le « réseau d’associations élémentaires » et la « dynamique profonde et originelle » qui sous-tendent l’intrigue. Ainsi passe-t-elle en revue la description que donnent ces œuvres des paysages, leur perception de Beyrouth et de ses ruptures urbaines, leur utilisation des « lieux » comme vecteurs de dépaysement et comme théâtre d’épreuves. « Souks, palais, bains, leur présence consacre l’appartenance reconnue du pays à l’Orient. Elle investit aussi bien l’organisation de l’espace que la représentation sociale, le rapport au temps à l’argent ou au corps ». Cette litanie orientale est, par ailleurs, un maillon entre les vestiges antiques et les points modernes (casinos, banques, cabarets…) Les personnages ne sont pas oubliés où s’affirment les communautés et leurs tropismes, les affaires plus ou moins louches, l’élément féminin dans sa dichotomie orientale (la sultane et l’esclave). Le roman policier fait en définitive ressortir, à travers ses clichés et sur fond de lutte Est-Ouest, un Liban complexe et plus d’une œuvre (celles de Jean Bruce en particulier) devient une parodie de voyage en Orient et de quête initiatique.
Malheureusement l’ouvrage recèle de nombreuses erreurs qui portent leur ombre sur une aussi vaste entreprise. Passe encore le fait de confondre systématiquement Jean Grenier (auteur d’Un été au Liban) et Roger Grenier, de renvoyer à un article de Chiha paru dans L’Orient ; mais que dire de «en 1947, le patriarche maronite de Beyrouth, Mgr Hayek » (erreurs sur la fonction et le titulaire) ? ou « des articles de Georges Naccache dans Al-Nahar » ? ou de Georges Schehadé formé à l’Ecole Supérieure des Lettres ??!! (et quelle distorsion pour son œuvre poétique parue en grande partie dans les années 1930 et 1940 et qui n’a jamais prononcé le mot Liban de la voir ravalée à un miroir de ce pays durant les années 1960 ?)
Mais là où le « miroir français »se brise, c’est quand, sans justification sérieuse, le témoignage des autochtones, écrivant en français ou même en arabe, lui est annexé et que les romans et recueils des Syriens et surtout des Libanais prennent dans le livre une place prépondérante.
L’ouvrage compte certes des faiblesses, il n’en demeure pas moins une contribution importante à l’histoire du rapport des 3 peuples et se lit avec un plaisir certain.
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